La santé connectée et "son" droit : approches de droit européen et de droit français

auteurs

  • Gambardella Sophie
  • Nicolas Guylène
  • Brosset Estelle

type de document

OUV

résumé

La montée en puissance d'acteurs au sein des processus décisionnels a souvent provoqué de la défiance dans la doctrine notamment juridique, comme en attestent les débats autour de l'avènement d'un apparent « gouvernement des juges » ou encore d'un prétendu « gouvernement des experts ». A l'heure actuelle, la crainte d'une confiscation du pouvoir décisionnel ne découle plus du rôle joué par une catégorie d'acteurs mais du progrès technique et des nouvelles technologies qui en résultent. L'heure est au « gouvernement de la technologie ». Les réflexions engagées sur l'avenir d'une justice prédictive, le développement de technologies persuasives ou encore la prolifération des objets connectés mettent toutes l'accent sur le bouleversement opéré par les mutations technologiques sur nos processus décisionnels, nos habitudes, nos modes de vie et peut-être même nos modes de raisonnement. Le domaine de la santé n'a pas été épargné par cette colonisation technologique, la santé devient elle aussi connectée. Le développement de la santé connectée est prolifique et bénéfique. La santé connectée permet des avancées en matière de qualité de la santé, de qualité des soins, d'accès aux soins et, dans le même temps, est une source de réduction des dépenses de santé. La santé connectée offre, en d'autres termes, tout à la fois des perspectives pour le renforcement de la qualité de la santé et pour l'assainissement des finances des systèmes de santé. Si les progrès, dont la santé connectée est porteuse, ne doivent pas être minimisés, les risques inhérents à cette dernière ne peuvent pas non plus l'être. En premier lieu, la santé connectée modifie la relation médecin-patient traditionnelle. Dans le cadre de la relation de santé, un certain nombre de données sont produites : certaines sont issues des examens médicaux ; d'autres du patient lui-même. Or, si la relation patient-médecin est majoritairement dématérialisée, les données produites par le patient lui même telles que son ressenti, son émotionnel peuvent échapper au médecin. Est-ce alors un problème pour la qualité des soins ? Dans la mesure où ces informations peuvent permettre de réfléchir sur les causes d'une maladie, d'une épidémie, elles sont nécessaires pour assurer une meilleure prise en charge du patient mais aussi pour améliorer la prévention médicale. Un raisonnement quasi mathématique priverait alors peut-être le corps médical d'informations fondamentales pour penser les causes de certaines affections. En deuxième lieu, la santé connectée tend à priver l'individu de son droit de ne pas savoir. En effet, un certain nombre d'applications, sans forcément être des dispositifs médicaux, indiquent, par exemple, aux individus les risques pour leur santé en fonction de leur activité physique, de leur âge ou encore de leur poids. A travers ces informations, ces technologies prédéfinissent ainsi le comportement à venir de l'individu et le prive alors d'une part de son libre arbitre. Il s'agit là surement davantage d'une question éthique que d'une question juridique qu'il ne fera ainsi pas partie de nos développements.

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